samedi 12 mai 2018

"Butter" de Erin Lange




traduit par Valérie Dayre
École des Loisirs

*

L'avis de Soizic :

Butter a 17 ans et 192 kg au compteur. Son obésité l'isole des autres et c'est seul qu'il mange tous les midi assis sur "son" banc, le seul siège capable de supporter son poids. Tous les midis il voit les regards posés sur lui, chacun s'interrogeant sur son menu du jour. Butter n'essuie quasiment jamais de moqueries, avec ce poids là, personne n'ose même se moquer. Butter est seul, sans aucun amis, à part Anna. La magnifique Anna avec laquelle il tchate tous les soirs. Elle ne sait pas à quoi il ressemble, elle ne sait pas qu'elle le croise tous les jours et depuis plusieurs mois une histoire d'amour s'installe entre eux par écrans interposés.

Butter a une mère qui l'adore et veille à le nourrir, un père qui a décidé de l'ignorer depuis plusieurs années déjà, et un professeur qui admire son talent pour la musique. Car Butter est saxophoniste. Un musicien vraiment talentueux. Mais la musique ne suffit pas à le rendre heureux.
Le jeune homme n'en peut plus de son corps qui l'entrave dans tout. Il n'a pas de vie sociale, pas d'avenir, pas de projets, ne peut pas marcher ou jouer de la musique très longtemps, quant à l'amour il a fait une croix dessus.

Alors Butter décide d'en finir. Et tant qu'à faire, il veut mourir avec panache. Et puisque ses camarades semblent très intéressés par ce qu'il mange, il mourra donc en mangeant, le soir du 31 décembre et il le fera en direct sur internet.

Pour se faire, Butter annonce son projet en ligne, et tout de suite tout le lycée va être au courant.
Ce qui va en découler, Butter ne s'y attendait pas...

Voilà un roman d'une grande finesse qui traite de tant de choses : le rapport au corps et à la nourriture, les relations sociales plus basées sur l'apparence que sur l'être, les réseaux sociaux où l'on se détache de la réalité, où l'on peut à la fois être soi et s'inventer un personnage, le voyeurisme morbide quand tout sur le net nous éloigne de la réalité, mais surtout le mal-être ressenti quand notre corps nous pèse, quand la nourriture est à la fois le bourreau et le refuge. Butter est intelligent, lucide, touchant, doué, drôle, mais il souffre. Il souffre de la solitude et il souffre de son corps. Pour autant, son histoire est optimiste et drôle et n'est pas sans rappeler le "Nulle et Grande Gueule" de Joyce Carol Oates.

Un roman à lire et à faire lire !



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